RD Congo : Situation humanitaire dans la province de Sud-Kivu - Rapport de situation #6, 21 mai 2025
Ce rapport est produit par OCHA RDC en collaboration avec les partenaires humanitaires. Il couvre la période du 16 au 30 avril 2025.
FAITS SAILLANTS
- Intensification des affrontements dans les territoires de Kalehe, Kabare et Walungu
- Près de 130 000 personnes déplacées recensées dans les territoires de Fizi et Mwenga
- 26 000 personnes assistées en vivres dans le territoire de Kalehe
- Plus de 21 000 personnes déplacées ont reçu des articles ménagers essentiels à Kalehe
CHIFFRES CLÉS
- 2,08M personnes déplacées internes au 31 mars 2025 (Source : CMP Sud-Kivu, 4 avril 2025)
- 514K personnes retournées au 31mars 2025 (Source : CMP Sud-Kivu, 7 avril 2025)
- 1,59M personnes en insécurité alimentaire, IPC3+ (Source : Analyse IPC de l’insécurité alimentaire aigue juillet 2024-juin 2025)
APERÇU DE LA SITUATION
Ville de Bukavu
La forte criminalité dans la ville de Bukavu reste préoccupante. En avril, au moins 50 cas de cambriolages et de fusillades ont été enregistrés dans plusieurs quartiers de la ville. Entre le 7 et le 13 avril, au moins 72 civils ont été arrêtés lors des opérations de bouclage visant à démanteler les réseaux criminels dans les quartiers Panzi et Chahi, selon des sources locales.
Par ailleurs, des familles déplacées continuent d’arriver dans la ville de Bukavu en provenance des territoires voisins. En mars, une ERM(1) avait confirmé la présence de plus de 99 000 personnes déplacées, seulement dans la ville de Bukavu. Celles-ci vivent dans des conditions précaires et n’ont pas reçu d’assistance.
Territoire de Kalehe
Durant le mois d’avril, de violents affrontements entre des éléments armés dans plusieurs villages de Hauts et Moyens Plateaux de Kalehe (Kasheke, Katasomwa, Ziralo, Civanga) ont poussé plusieurs milliers de personnes à quitter leurs habitations. La situation reste toujours tendue autour des localités de Bushaku, Katasomwa, Chambombo, Shanje et Lumbishi, situées à la limite des groupements de Buzi et Mbinga Nord avec Ziralo et Mubuku. Plusieurs incidents de violations des droits humains impliquant des acteurs armés ont également été rapportés, notamment des coups et blessures, des enlèvements, des mariages forcés et des viols sur mineurs.
Une évaluation rapide multisectorielle, réalisée par l’ONG AIDES(2) du 18 au 25 avril, a confirmé la présence de plus de 17 300 personnes (2 896 ménages) dans les aires de santé de Kalehe et Ishovu, chefferie de Buhavu, ZS de Kalehe. Ces personnes ont fui des affrontements dans les localités de Lemera, Katasomwa, Bushaku Nyawaronga en avril, et les localités de Bushushu, Nyamukubi, Nyabibwe Kinyezire Mukwidja en février.
Territoire de Walungu
L’intensification des affrontements dans le territoire de Walungu au mois d’avril, couplée aux violations des droits humains, ont fortement perturbé les activités socio-économiques.
Entre le 18 et le 30 avril, des affrontements entre l’armée congolaise et un groupe armé sur l’axe BukavuNyangezi -Kaziba et Luhwindja ont occasionné le déplacement d’environ 24 500 personnes vers plusieurs localités à l’est de la chefferie de Kaziba, ainsi que vers la chefferie de Luhwindja, dans le territoire de Mwenga. Des patients qui étaient internés à l’hôpital Général de Référence de Nyangezi, ainsi qu’à l’hôpital Général de Kaziba, ont également été contraints de fuir, selon les sources humanitaires. Par ailleurs, au moins 10 civils ont été blessés lors des combats à Bwahungu et Mulamba, dans la chefferie de Ngweshe, au cours de la même période.
Selon des acteurs humanitaires et des sources locales, plus de 86 000 personnes déplacées (15 237 ménages) sont arrivées depuis début avril dans les zones de santé de Walungu, Nyangezi, Mubumbano et Kaziba.
Territoire de Kabare
En avril, des affrontements entre des groupes armés ont été observés sur l’axe Miti-Kavumu-KatanaKabamba. Des cas de justice populaire ont également été signalés. Le 27 avril, à Lomera dans le groupement de Luhihi, une foule en colère a lynché un homme soupçonné de collaborer avec un groupe armé.
Des incursions répétitives d’éléments armés sur la RN23 (axe Bukavu-Kavumu-Katana-Kabamba-Kalehe) et la RN(3) (Miti-Bunyakiri), ont perturbé le trafic sur ces axes, obligeant certaines organisations humanitaires à suspendre momentanément leurs activités. En plus, des barrières payantes y ont été érigées, restreignant la libre circulation et l’accès des populations aux champs et autres moyens de subsistance.
Territoires de Fizi et Mwenga
Dans les hauts plateaux de Minembwe et d'Itombwe, le contexte reste marqué par une intensification des affrontements entre l’armée congolaise et des groupes armés. Cette recrudescence de violence continue d’entrainer des déplacements de populations et d’affecter leurs moyens de substance. Le 23 avril, l’affrontement entre deux groupes armés à Rugezi s’est étendu vers la forêt de Sabuni, brisant l’accalmie fragile observée depuis le 14 avril.
Depuis mars, des affrontements successifs ont entraîné une détérioration rapide de la situation humanitaire des communautés, déjà confrontées à leur dixième épisode de déplacement depuis la fin de l'année 2024. Selon plusieurs alertes humanitaires, plus de 129 500 personnes déplacées ont été recensées dans les territoires de Fizi et Mwenga (secteur d'Itombwe). Les acteurs humanitaires estiment que seulement 85 300 personnes parmi les déplacés sont accessibles sur les axes suivants : Pungu-Point-Zéro, Nakiele-Kanguli (zone spéciale de Nundu), Umoja-Bwala-Kilicha-Lulimba (ZS Fizi), Mukera-Kichula-Lumanya (ZS Fizi), Sebele-Fizi Centre-Namisha-Burembo (ZS Fizi) et Bibokoboko-Kisombe (ZS Fizi).
Selon une Evaluation Rapide de Protection (ERP) réalisée par l’ONG ACTED, 2 462 familles déplacées et 6 177 familles d'accueil, soit plus de 43 000 personnes, ont été identifiés dans plusieurs villages de la zone de santé de Nundu, Groupement de Babungwe Nord (Secteur de Tanganyika). Ces personnes ont un besoin urgent d’aide humanitaire.
Territoire et ville d’Uvira
Une multitude d’acteurs armés présents sur le territoire d’Uvira continuent de menacer la sécurité des civils. Au cours du mois d’avril, des cas de viol, d’extorsions de biens et des coups et blessures attribuables aux hommes armés, ainsi que des barrières payantes, ont été signalés dans plusieurs entités des groupements de Bamuguba-sud et d’Ikama-Kasanza.
Par ailleurs, plusieurs affrontements armés opposant l’armée congolaise et des groupes armés ont été enregistrés depuis le début du mois d’avril dans les villages autour de la ville d’Uvira.
Territoire de Shabunda
Dans la nuit du 18 au 19 avril, des altercations entre des éléments d’un groupe armé dans le site minier à Lubongolo, groupement de Bamunguba-Sud, se sont soldées par le pillage des biens de la population. A la suite de cet incident, plus de 2 700 personnes ont fui vers les villages Idinga, Kisuku ainsi que dans la brousse.
Situation épidémiologique
- Mpox : Entre le 31 mars et le 27 avril (semaines épidémiologiques 14 à 17), la province du Sud-Kivu a déclaré 1 632 cas de Mpox, dont 3 décès, portant le total depuis le début de l’année à 9 106 cas et 13 décès. Toutes les 34 zones de santé sont touchées, parmi lesquelles sept ont enregistré le plus grand nombre de cas : Miti-Murhesa, Nyangezi, Uvira, Nyantende, Lulingu, Minova et Walungu.
- Choléra : En avril, durant les semaines épidémiologiques 14 à 17, la Direction Provinciale de la Santé (DPS) a rapporté 870 cas, avec quatre décès ; ce qui porte le total depuis le début de l’année à 2 205 cas et 17 décès. Les zones de santé de Minova, Idjwi, Ruzizi, Katana, Bunyakiri, Ibanda et Mubumbano ont été déclarées en état d’épidémie.
- Rougeole : Jusqu’au 26 avril (semaine 17), la DPS a recensé 573 cas de rougeole, dont 25 décès, portant le total depuis le début de l’année à 1 865 cas et 71 décès. Les zones de santé de Kalole, Lulingu, Kitutu et Nyangezi sont en situation d’épidémie.
Accès humanitaire
Plusieurs territoires du Sud-Kivu restent inaccessibles à l’aide humanitaire en raison de la détérioration des routes et de l’insécurité persistante.
En avril, le Forum Accès du Sud-Kivu a mené une mission d’évaluation sur l’axe Bukavu-Kamanyola-LuvungiSange-Uvira. La mission n’a pu aller à son terme, contrainte de s’arrêter à mi-chemin entre Kamanyola et Katogota, à cause des limitations d’accès imposées par un groupe d’individus armés. En raison des contraintes sécuritaires, plus de 905 000 personnes déplacées n’ont pas pu accéder à l’assistance humanitaire dans les territoires d’Uvira, Fizi et Mwenga (CMP du 31 mars 2025)
Par ailleurs, dans la nuit du 8 au 9 avril, d'importants glissements de terrain ont causé trois jours d’interruption
- Evaluation Rapide Multisectorielle
- Actions et Interventions pour le Développement et l’Encadrement Social
- Route Nationale numéro 2